A la fois blog de veille pédagogique, institutionnelle, et blog dédié à l'actualité du collège, "Doc ad hoc" se veut avant tout un outil de travail et d'information à destination des enseignants du collège Maurice Constantin-Weyer (Cusset).

dimanche 12 janvier 2014

"Apprendre/désapprendre : sur la ligne de crête des apprentissages numériques" Dominique Cardon, sociologue à Orange Labs, professeur associé au Laboratoire techniques territoires et sociétés de l’université de Marne la vallée.

Un article riche d'enseignement sur l'art d'apprendre et sur la manière d'apprendre avec le numérique.

L'auteur souligne la nouvelle tendance de l'enseignement : apprendre chez soi pour exercer ses nouvelles compétences et ses nouveaux acquis en classe.
Apprendre ou désapprendre
avec le numérique ?

Cet article développe d'une manière beaucoup plus rigoureuse la nouvelle pratique de la "classe inversée" dont je vous ai déjà parlé.

Dominique Cardon s'interroge sur "les nouvelles formes d’apprentissage [qui ne] sont donc pas à chercher dans les technologies, mais dans les transformations du système pédagogique qu’elles rendent possibles." Quelle est la place du savoir dans nos sociétés, comment éduquer à l'apprentissage alors que l'Ecole n'est justement plus le seul lieu d'apprentissage, "car, à bien y regarder, les technologies peuvent aussi bien favoriser l’apprentissage que le désapprentissage et sans doute est-ce parce que cette ligne de partage est instable, fragile et incroyablement sensible aux équilibres humains qui composent toute situation éducative, qu’il est si important pour les pédagogues de savoir comment guider leurs élèves du bon côté."

Le numérique, comme le live avant lui, extériorise la mémoire humaine, nos savoirs y sont enfermés, afin de libérer "notre esprit pour qu’il conduise des activités cognitives d’un niveau supérieur" à l'heure où la connaissance est au cœur de la vie sociale et professionnelle.

Qu'apprendre ?
"Apprendre à trouver, à s’approprier, à critiquer, à historiciser les connaissances pour savoir les mobiliser à bon escient dans divers contextes", [..] apprendre à interpréter plutôt qu’à emmagasiner suppose une familiarisation profonde avec la structure des connaissances et requiert une mise en intelligibilité d’informations multiples, disparates, certes disponibles et accessibles à tous, mais qui ne peuvent être réagencées et réarticulées sans mettre en œuvre une compréhension globale, curieuse et aiguisée".

Le rôle de l'enseignant ?
Justement apprendre aux élèves à apprendre, pour ne pas creuser davantage les écarts, les inégalités socio-culturels des élèves. "Apprendre à apprendre n’est pas une tâche triviale et fonctionnelle qui dévaluerait la noble posture du professeur omniscient. Elle ne se contente pas de laisser libre cours aux apprenants en les laissant se débrouiller tout seuls, sans règle ni méthode, dans le flux chaotique des informations numériques et les si nombreux attraits de la dispersion".


Face à cette nouvelle problématique, de nouvelles démarches pédagogiques doivent être mises en place. L'auteur insiste sur" la place grandissante des activités coopératives et du travail en équipe. Les pédagogies nouvelles s’attachent toutes à amplifier les interactions et les contacts personnalisés entre les apprenants eux-mêmes et entre les apprenants et l’enseignant". L'enseignant doit, pour ne pas passer à côté de son rôle premier être capable de créer " un lieu vivant d’incarnation, de partages et de mises en exercice des savoirs".

Dans le même temps, l'article souligne l'importance de la valorisation des élèves, sur l'importance de développer une véritable estime de soi.

Avec le numérique tout un chacun est son propre éducateur. Mais le danger est bin réel : il y a un véritable processus " de désapprentissage, un risque permanent de “prolétarisation des esprits” souligne Bernard Stiegler : crise de la lecture, disqualification des savoirs, dispersion de l’attention, matraquage du marketing commercial, tyrannie de l’immédiateté, manque de curiosité… "


Pour clore son article, Dominique Cardon insiste sur un point qui lui semble essentiel dans la sphère éducative : il ne faut pas se contenter à l'Ecole d’une éducation au numérique uniquement responsabilisante et développant "des compétences manipulatoires (comme le b2i)", mais il s'agit bien de développer chez les élèves "une capacité à fabriquer le numérique". "Le code informatique est aujourd’hui devenu le nouvel alphabet de nos sociétés, sa langue, son véhicule et son décor. Comment peut-on laisser cette boîte noire se refermer sur des utilisateurs certes agiles, mais incapables de décoder sa fabrication (sans parler de la modifier, l’améliorer, la réinventer) ? "




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